Saisons d'écriture

Saisons d'écriture

Qu'est-ce qu'un bon écrivain aujourd'hui ?

Qu'est-ce qu'un bon écrivain aujourd'hui ?

 

La question va paraître très condescendante à certains, et pourtant..., La Bruyère en son temps s'était livré à cet exercice dans son ouvrage : «  les caractères ». En voici quelques extraits révélateurs :

  • C'est un métier de faire un livre, comme de faire une pendule : il faut plus que de l'esprit pour être auteur.

  • Il y a de certaines choses dont la médiocrité est insupportable : la poésie, la musique, la peinture, le discours public. Quel supplice que celui d'entendre déclamer pompeusement un froid discours, ou prononcer de médiocres vers avec toute l'emphase d'un mauvais poète.

  • L'on devrait aimer à lire ces ouvrages à ceux qui en savent assez pour les corriger et les estimer. Ne pas vouloir être ni conseillé, ni corrigé sur son ouvrage est un pédantisme.

  • Quand une lecture vous élève l'esprit, et qu'elle vous inspire des sentiments nobles et courageux, ne cherchez pas une autre règle pour juger l'ouvrage, il est bon, et fait de mains d'ouvrier.

  • Tout écrivain, pour écrire nettement, doit se mettre à la place de ses lecteurs, examiner ses propres ouvrages comme quelque chose qui lui est nouveau, qu'il lit pour la première fois, où il n'a nulle part, et que l'auteur aurait soumis à sa critique ; et se persuader ensuite qu'on n'est pas entendu seulement à cause que l'on s'entend soi-même, mais parce qu'on est en effet intelligible.

 

Les mots utilisés aujourd'hui, sont hélas bien plus triviaux et d'un éclat bien terni ; toutefois ils porteront sans doute plus aisément, la marque de ce temps.

L'auto-édition permet à tout en chacun de s'exprimer par le biais de l'écriture, cependant cela ne fait pas du personnage un écrivain. Alors à quoi reconnaît-on un bon écrivain ? Tout d'abord au fait qu'il raconte une bonne histoire, qu'il respecte ses lecteurs (trices), qu'il maîtrise sa langue, qu'il allie imagination, rêverie, et poésie avec tous les talents de son âme.

Une bonne histoire, c'est avant tout une histoire que vous aimeriez que l'on vous raconte, une aventure qui vous tient en haleine, vous émeut, vous touche l'âme, entretient le suspense, fait jaillir des souvenirs en vous.

Le respect du lecteur, c'est avant tout se mettre à sa place ; aimerions-nous entendre ou lire la description d'un château-fort sur sept à huit pages ? Pourriez-vous rester concentré, dans un roman, sur les explications alambiquées des us et coutumes du moyen-âge ? Seriez-vous fasciné par un personnage tout à fait commun sans l'éclat d'une action ? Cela attise-t-il votre curiosité de savoir que les chaussures du héros sont en daim plutôt qu'en cuir (sauf si ce détail a son importance dans une intrigue policière) ? Est-il important de savoir que dans la chambre de Maryse, le papier peint comporte des oiseaux et des fleurs et que la psyché est à gauche de la porte de la salle de bains ? Aimeriez-vous retrouver dans un roman les mêmes dialogues communs que vous entendez chaque jour ? Et bien, tout ceci fait partie du respect du lecteur : ne pas l'inonder d'explications géographiques, historiques, architecturales, décoratives, de mode...

 

Ne pas lui faire vivre des histoires sans queue ni tête, ne pas l'abêtir par des dialogues insipides, ne pas le prendre pour un imbécile par des évidences qui forment des pléonasmes.

On écrit pour les autres, n'en déplaise à Marc-Aurèle. Il est donc primordial que ce que l'on écrive plaise aux autres. Un roman n'est pas une étude sociologique, ni un pamphlet politique, ni un dogme religieux, n'enfermez pas vos lecteurs(-trices) dans une pensée unique. N'obligez pas les bouquineurs(-ses) à suivre une ligne droite comme un rat de laboratoire, au bout de laquelle il n'aura peut-être même pas sa récompense. La liberté de penser est la première des libertés, et à ce jour, elle nous appartient encore totalement, il est donc important que nous puissions en jouir. La lecture nous offre cette possibilité, elle agrandit également notre pouvoir de l'imaginaire. En fermant ces portes dans un livre trop condensé, on insulte le lectorat.

 

 

Parlons ici de la maîtrise de la langue. On mettra en avant le français puisque c'est notre langue. Bien sûr, il y a eu une révision de cette langue en 1990, ainsi certains mots qui auraient été considérés comme faux avant, ne le sont plus aujourd'hui.

 

 

 

 

On ne parlera pas ici du bien-fondé de l'évolution du langage. Mais quoi qu'il en soit, il n'en demeure pas moins, que l'écrivain est un artiste, dont les instruments sont le langage et l'écriture. Imaginez un guitariste avec un instrument auquel il manque plusieurs cordes, il ne peut pas faire de la bonne musique. À Saisons d'écriture, nous avons connu une auteure auto-publiée, qui vend aujourd'hui énormément de livres ; son écriture au départ, était celle d'une enfant de sept ans : les fautes de français étaient plus nombreuses que le reste du texte, la narration horrible, les tournures, épouvantables. Pourtant, les histoires étaient captivantes, les mondes enchanteurs, les personnages fort bien campés. Alors on a décidé de l'aider, et on lui a conseillé de travailler en binôme. Après quelques années, elle a suivi nos recommandations, et aujourd'hui, ses livres font plus que recette. Toutefois, si elle avait continué sur ce chemin, elle aurait fini par ne plus rien vendre.

La relecture à voix haute, la bêta-lecture par des amis ou connaissances, sont de bonnes méthodes pour travailler son texte. Il existe également des logiciels de correction, des détecteurs de répétition, des dictionnaires de synonymes, et des sites sur la langue française en général.

Tout cela est gratuit, pas besoin d'avoir recours à des méthodes d'escrocs qui ne mènent nulle part et nous prennent pour des imbéciles, à des soi-disant correcteurs(-trices), qui vous font payer cher leurs services.

Bien sûr, la critique est dure, et pas toujours facile à digérer, cependant c'est elle qui élève l'auteur(e), et non pas l'éloge.

 

Certains « styles » d'écriture sont particulièrement rebutants,

le style télégramme : « l'homme était assis. Il buvait un café. Il était huit heures. Il allait au travail... »

Mettre un point tous les trois mots, c'est ignorer le sens de la ponctuation.

Le style descriptif : « Le canapé bleu aux rayures rouges, avec des pieds en acajou, sculptés par maître Pierre Ferro, trônait sur le tapis persan aux chatoyantes couleurs entrelacées de dessins géométriques, faisant penser à une toile de Kandanski, dans ses plus belles œuvres. La lampe aux reflets orangés...

Ce style fut employé en son temps alors que la télévision n'existait pas encore. Il est aujourd'hui obsolète et lourd.

Le style détaché : « On cogne à la porte. Marc se lève, il a peur. Les coups redoublent, plus fort. Il tremble un peu lorsque sa main se pose sur la poignée de porte, il ouvre :

Salut, tu dormais... ? »

Ce style consiste à décrire une scène sans y mettre aucun sentiment. Cette méthode plaît peut-être beaucoup aux intellos et aux bobos qui se donnent un genre, mais on ne peut pas appeler ça de la littérature.

 

 

 

 

Le style Bukowski : « Cette vieille pute édentée, croyait encore tenir le haut du trottoir, les relents s'échappant de ses trous béants auraient fait vomir plus d'un rat. Je hais ces vieilles salopes qui se croient belles, mais qui ne sont que des trous puants. Tiens j'me la fourrerais bien quand même. »

Cette façon de parler alliant grossièreté et vulgarité ne peut être permise qu'à des génies. Penser singer ce style en attribuant dans ses dialogues des « merde, fait chier, putain » ne relève pas d'un caractère génial !

 

 

 

 

En conclusion, être un bon écrivain, c'est suivre une ligne de conduite au pays de l'imaginaire.

 

 

Voici ce que pense Anne Sylvestre du fait d'écrire :

 

 

 



08/03/2019
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