Comment comprendre ses personnages? Démystification !
Bonjour
Aujourd'hui nous voudrions vous parler des méthodes américaines qui consistent à vous faire croire, que le métier d'écrivain ne nécessite que quelques apprentissages de base. En fait ces méthodes avant-gardistes, sont un peu comme des multinationales des meubles face aux artisans ébénistes. On avance que tout le monde peut devenir écrivain(e) en oubliant qu'il faut du talent. Certes on peut et on doit améliorer son écriture, mais de là à uniformiser celle-ci pour un publique lobotomisé...
Dernièrement un article posté sur Facebook nous a donné à réfléchir et à nous insurger, le voici
Comment mieux comprendre ses personnages
L’auteur a un point commun avec le comédien : à un moment, il doit se glisser dans la peau de son personnage pour mieux le comprendre, et surtout, savoir ce qu’il/elle penserait ou ferait dans telle ou telle situation du récit. Pour cela, le comédien travaille et apprend des techniques qui sont la base de son art, mais l’écrivain, lui, n’a pas cette chance.
Parce que se prendre pour quelqu’un d’autre n’est qu’une petite facette de son activité, l’auteur ne peut y consacrer autant de temps que l’acteur. C’est pourquoi je vous propose une méthode qui vous permettra, en moins d’une heure, de comprendre vos personnages en profondeur.
SDE : Vous voyez ça ne prendra qu'une heure, deux pater noster et trois ave Maria
Attention !
Je ne parle pas ici 1des fiches personnage. Ces fiches font partie de la 2 trousse à outils de l’auteur et doivent être les plus complètes possible. Dans ces fiches, 3 vous écrivez une description complète de votre personnage, son passé, ses traits de personnalité, ses origines sociales, etc. Même si vous ne vous servez pas de ces informations dans votre roman, elles serviront à rendre vos personnages les plus aboutis possible.
SDE : Prenons dans l'ordre,
1 les fiches des personnages sont une invention supplémentaire, pour ceux qui tentent l'écriture à défaut d'autre chose. On vous montre pas à pas une structure qui tient une seule ligne, d'où la facilité et la simplicité de la chose. On vous parle de littérature mais on écrit en franglais, en français familier : « fiches personnage » n'est pas une description française, on devrait écrire, les fiches des personnages ; mais pourquoi s'encombrer des articles ?
2 Là c'est très clair on vous prend pour un ouvrier ou un artisan, seulement l'artisan compose avec talent l'ouvrier suit des lignes directrices.
3 On vous parle en vous prenant pour des simplets : des redites, un langage lourd et répétitif, bref un aperçu des méthodes d'outre-Atlantique. Nous allons vous résumer ces passages : Décrivez votre personnage de pied en cap.
Le Design thinking
( traduction...) La maquette pensée
Il s’agit d’une méthode utilisée par 1 les sociétés qui sont très orientées « innovation ». 2 Des entreprises qui cherchent en permanence à développer de nouveaux produits pour répondre au maximum aux besoins de leurs consommateurs.
3 Cette méthode se compose de nombreuses étapes d’enquête sur le terrain, de prototypage, de test, etc. qui ne nous intéressent pas. 4 La seule qui nous concerne en tant qu’auteur est la phase de la « carte d’empathie ». 5 Lors de cette étape, les designers essaient de se mettre à la place de leurs clients cibles pour déterminer quels sont leurs besoins. 6 Je vous propose d’utiliser cette méthode efficace pour rentrer dans les chaussures de nos personnages.
SDE : 1 Bien sûr, il s'agit là des « States »,
2 Toutes les entreprises correspondent à cette définition, même celles qui ne sont pas « orientées innovation ».
3 Si ça ne nous intéresse pas, pourquoi le dire ?
4 Moi j'ai ma carte orange, c'est quelle couleur la carte empathie ?
5 C'est pourquoi on a inventé les sondages, précisément parce que les « maquettistes » ne savent pas se mettre à la place des clients.
Un exemple pour le faire ensemble (j'sais pas si ça va le faire).
Pour illustrer cet article, je vous propose de prendre l’exemple d’un personnage. Celui d’une nouvelle actuellement en cours d’écriture.
Ce personnage est une jeune femme de 25 ans nommée Véronique Peyrot. 1 Elle est plutôt jolie et travaille dans la vente de parfumerie de luxe à Paris. 2 De nature plutôt frivole et sociale, elle aime sortir en boîte avec ses amies, vivre sa vie à pleine vitesse et 3 prend peu de temps pour s’occuper d’elle-même. 4 Adepte du fast-food, son hygiène de vie est mauvaise. 5 Son grand but dans la vie (avant que l’histoire ne commence) est de trouver l’âme sœur. 6 Dans cette nouvelle qui la met en scène, Véronique va découvrir que des bâtonnets de surimi lui poussent directement sur la poitrine (oui, oui, vous avez bien lu).
SDE :
1 Cliché ! La jolie nana qui travaille dans un magasin de luxe et comme par hasard au rayon parfumerie. On se croirait dans une série B américaine.
2 Re-cliché. On commence à apercevoir le stéréotype même de la bimbo sans cervelle.
3 Contradiction. On ne peut pas être sociale, sortir en boîte, travailler dans un magasin de parfumerie, et ne pas s'occuper de soi.
4 Là, c'est sûr, c'est la blonde sans cervelle ; elle fait n'importe quoi, elle parle pour rien dire, elle est irresponsable et négligente.
5 Et en plus elle est midinette. Qui voudrait d'elle pour personnage principal de son œuvre ?
6 Alors là, c'est normal, il lui arrive un gros malheur physique qui va la bouleverser... On sent poindre la leçon de morale réservée aux femmes frivoles.
1 Cette situation est, évidemment, la base de mon histoire. La grande question est : comment va-t-elle réagir ? Que va-t-elle faire ? 2 Car le déroulement de mon histoire va grandement en dépendre.
3 En tant qu’homme de 40 ans (hum… passés) qui ne mange que du poisson frais, j’ai du mal à cerner ce qu’une jeune femme de 25 ans ferait si une telle chose lui arrivait. Je vais donc suivre les trois étapes pour rentrer dans sa peau.
SDE :
1 Si on choisit une situation qu'on ne peut qualifier de cocasse, mais plutôt genre « tarte à la crème », on peut délirer à souhait sur le personnage et ses actions.
2 C'est une évidence.
3 Si un homme de quarante ans qui se prétend écrivain, se lance dans ce genre d'histoire rocambolesque, on est en droit d'espérer qu'il ait l'imagination nécessaire pour poursuivre dans cette lignée.
1 — La fiche personnage visuelle
1 Pour cette première étape, vous allez reprendre les grandes lignes de votre fiche personnage écrite et vous allez la retranscrire en dessin sur le papier avec des crayons ou des feutres de couleur.
Hop hop hop! Les deux du fond qui se barrent sous prétexte qu’ils ne savent pas dessiner. Revenez ici tout de suite !
En effet, pas besoin d’être Michel-Ange pour cela. Si vous êtes au niveau « bonhommes bâtons » de la cour de maternelle, sachez que cela fonctionnera très bien.
2 Le but est d’ancrer la fiche personnage par des portraits, des symboles, des idiomes ou toute autre forme de représentation graphique pour que notre cerveau (qui carbure aux images à 80 % de son temps) l’intègre le plus possible.
3 Pas de rubrique obligatoire sur la constitution de cette fiche visuelle. Prenez les éléments qui vous semblent les plus importants et amusez-vous à les rendre graphiques. Mettez de la couleur. Faites-vous plaisir.
4 Un point important : vous devez tout faire vous-même pour bien l’intégrer. Cela signifie que les collages sont interdits. Dessin uniquement.
5 Pour illustrer, voici la fiche visuelle de notre pauvre Véronique (n’applaudissez pas mes talents de dessinateur. Ce n’est pas utile;) )
SDE :
1 Les enfants, soyez bien sage, tout le monde prend ses crayons de couleur, Mathieu pourquoi tu pleures ? Véronique, mouche ton nez...
2 Ou l'art de vous prendre pour des c... illétrés.
3 Julien, on n'embête pas sa p'tite camarade, se faire plaisir doit rester dans le respect des autres...
4 Il est important que vous payez comptant vos séances de psychanalyse, sinon elles n'auront pas l'effet escompté...
5 Et bien sûr, Véronique... c'est une blonde ! Le cercle est bouclé.
2 — La carte d’empathie
1 On rentre dans le vif du sujet avec cette étape qui est sans doute la plus importante des trois. Ici, pas de dessin, mais un échange de chaussures entre vous et votre personnage (pensez à les récupérer après). La carte d’empathie se présente sous la forme du schéma ci-dessous.
2 Pour la remplir, il est nécessaire de commencer par les observations du personnage sur ce qui l’entoure dans le contexte de l’histoire. Par exemple, qu’est ce que Véronique entend autour d’elle quand ces bâtonnets de surimi commencent à se voir sous son pull. Quelles sont les réactions de son entourage (amies, famille, collègues, etc.) ? Qu’est ce qu’elle voit, observe, tout autour d’elle dans cette situation très inédite.
Ensuite, quelles pensées vont se former dans l’esprit de Véronique suite à ces observations. Quelles vont être les petites phrases qui vont traverser son cerveau ?
Enfin, que va-t-elle faire ou dire dans le prolongement de ses pensées. Ces actions doivent être concrètes et se retrouveront très probablement dans votre histoire.
SDE :
1
2 On a l'impression de se retrouver dans un séminaire américain de gourous commerciaux.
Les petits dessins façon gamin de trois ans vous feront assurément évoluer vers une écriture majestueuse et digne de Voltaire !
3 — Les vignettes
1 Troisième et dernière étape, il faut récupérer les crayons de couleur et les feutres et repartir sur sa planche à dessin.
2 Comme nous avons ancré la fiche personnage avec des visuels dans notre cerveau, nous allons nous imprégner de la carte d’empathie en créant une série de vignettes sous la forme d’une petite bande dessinée.
3 Ces vignettes ne sont pas là pour raconter l’histoire (ce n’est pas un story-board contrairement à ce que je dis maladroitement dans la vidéo), mais pour placer le personnage dans toutes les situations du roman qui vont générer une réaction chez lui.
4 Dans le cas de Véronique, et puisqu’il s’agit d’une histoire courte, c’est quasiment toute l’histoire qui apparaît sur ces vignettes. Dans le cadre d’un roman, cependant, il conviendra de se concentrer sur les moments forts du récit, voire d’extrapoler sur des situations qui n’y apparaîtront pas. Le but est de comprendre et de ressentir le personnage, pas de raconter une histoire.
5 Une fois ce travail fait, vous avez une vision concrète et précise de la psychologie de votre personnage et vous pouvez le laisser vous guider à travers l’intrigue et les événements de votre propre roman.
6 Cet article est maintenant terminé, j’espère qu’il vous a plu. Si c’est le cas, merci de le partager un max. Vous êtes de plus en plus nombreux à suivre ce blog, et cela fait chaud au cœur. N’oubliez pas que vous pouvez donner, en commentaire, des idées de sujets que vous aimeriez voir traités dans ces pages.
SDE
1 Allons, allons les enfants, on reste concentrés !
2 Les visuels dans notre cerveau, faut mieux les avoir là qu'ailleurs !
3 Dans certaines écoles, on apprend les langues avec ce genre de petit théâtre enfantin, style guignol. On se doute qu'avec ce genre d'apprentissage, même un livre pour enfant en bas âge serait encore trop nigaud.
4 En fait, l'histoire se résume à : Véronique est une godiche blonde, sur qui poussent soudainement des surimis pour lui apprendre à prendre soin d'elle. C'est un condensé de sexisme, de niaiserie, de clichés, qu'il vous est déconseillé de suivre si vous voulez vraiment faire de la littérature. Maintenant, si vous êtes de ceux pour qui l'important est de vendre beaucoup peu importe la qualité...
5 C'est vrai, parfois j'ai de la peine à suivre mes personnages, tellement ils sont indépendants.
6 On vous avoue que vous êtes de plus en plus nombreux à venir grossir les rangs du troupeau bêlant et stupide qui suit le joueur de flûte de Hamelin.*
Pour tous ceux qui suivent avidement ce blog :
Quant à nous à Saisons d'écriture, nous vous conseillons, peut-être un peu trivialement, de ne pas péter plus haut que votre c.. Après tout, tout le monde ne peut pas être Voltaire, la majorité des gens n'a pas le talent de Baudelaire, et rares sont ceux qui peuvent rivaliser avec Céline. Il est important de connaître ses capacités en toutes choses, il n'y a pas de mal à ne pas être doué pour la littérature, et si l'on s'en rend compte, c'est avec humilité qu'il faut s'orienter vers autre chose.
Nous maintenons que pour réussir un bon livre, il faut avoir du talent, de l'expérience de vie, de la passion, de l'imagination, de l'envie. Si vous avez tout cela, et, comme le disait Reiner Maria Rilke, si chaque jour la première chose que vous ayez envie de faire, c'est d'écrire, vous êtes un écrivain.
Si vous suivez des méthodes à l'américaine pour écrire vos histoires, vous risquez fort d'écrire tous la même chose : un ramassis de clichés sans âme et sans teneur. On voit le résultat actuellement avec les auteurs tels que Marc Levy ou Guillaume Musso.
Voici ce que pondent les maisons d'éditions aujourd'hui :
Pour tous ceux qui écrivent avec les pieds, rien n'est perdu !
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