Les écrivain(e)s ont-ils un genre qui leur colle à la peau ?
À lire certains écrivains, on peut se demander pourquoi la plupart n'écrivent que dans un genre. Même lorsque parfois ils sortent de leur genre de prédilection, ils ne peuvent s'empêcher d'écrire leur œuvre dans le même style. Par exemple dans les œuvres littéraires connues, on remarque :
dans le domaine de l'horreur et romans à suspens, Stephen King,
dans le domaine de la science-fiction, Philippe K. Dick,
dans le domaine de la fantasy, Michaël Moorcock
dans le domaine de la romance, Barbara Cartland
dans le domaine du fantastique, Bram Stocker
dans le domaine du policier Agatha Christie
dans le domaine de l'érotisme, Donatien Alphonse François de Sade
dans le domaine de la poésie, Charles Baudelaire
dans le domaine roman historique, Alexandre Dumas
dans le domaine de la société, Émile Zola
dans le domaine politique, Jean-Paul Sartre
Lorsque Baudelaire a écrit Le Spleen de Paris, il n'a pu s'empêcher de poétiser cette œuvre sous forme d'odes, en voici un extrait :
À une heure du matin
Enfin ! seul ! On n’entend plus que le roulement de quelques fiacres attardés et éreintés. Pendant quelques heures, nous posséderons le silence, sinon le repos. Enfin ! la tyrannie de la face humaine a disparu, et je ne souffrirai plus que par moi-même.
Enfin ! il m’est donc permis de me délasser dans un bain de ténèbres ! D’abord, un double tour à la serrure. Il me semble que ce tour de clef augmentera ma solitude et fortifiera les barricades qui me séparent actuellement du monde.
Stephen King a écrit un roman de fantasy :
La Tour Sombre
On peut remarquer que dans ce roman, il se laisse prendre également au même style qu'avaient des romans comme Shining ou Simetierre. En voici un extrait révélateur :
De part et d’autre, les maisons se faisaient à présent plus fréquentes tout en restant dans l’ensemble inoccupées. Il longea un minuscule cimetière, dont les tombes en bois, déjetées, moisies, succombaient sous l’assaut de nauséabonds bouquets d’herbe du diable. Encore quelques pas et un panneau rongé lui apparut. TULL. La peinture était écaillée au point de le rendre presque illisible. Il en trouva un autre un peu plus loin mais ne put le déchiffrer.
Philip K Dick semble cantonné à la science-fiction dans tous ses sous-domaines, il n'a écrit que peu de nouvelles dans le domaine de la fantasy, et du policier. Par exemple dans ce recueil de nouvelles fantastiques :
Le Roi des Elfes
Le Constructeur :
Qu’avait-il donc ? Peut-être devrait-il consulter un médecin. Les bruits, les gens, tout le contrariait. Par tout le vacarme et l’effervescence. Il ne dormait pas assez la nuit. Peut-être était-ce une question d’alimentation. Et puis il travaillait tellement dur dans son jardin ! Quand il allait se coucher le soir, il était épuisé. Elwood se frotta le front. Les gens, le bruit, les conversations incessantes tout autour de lui, ces formes ininterrompues qui se mouvaient dans les rues et les magasins...Dans la vitrine de la boutique, un grand téléviseur diffusait l’image joyeusement palpitante d’une émission privée de son. Elwood se mit à regarder passivement.Une femme en collant faisait de l’acrobatie, se lançant tout d’abord dans une série de grands écarts avant de faire la roue puis d’accomplir plusieurs sauts périlleux.Elle marcha un moment sur les mains en souriant aux spectateurs ; ses jambes s’agitaient en l’air. Puis elle disparut, et ce fut le tour d’un homme vêtu de couleurs vives qui tenait un chien en laisse.
Dans le pamphlet d'Emile Zola, « J'accuse », on ressent terriblement les accents de Germinal.
Lorsque Victor Hugo, romancier prolixe et fleuve, s'est essayé à la poésie, on a tout de suite remarqué que ce n'était pas là son domaine de prédilection.
Alors, les auteur(e)s, prisonnier(e)s de leur genre ?
Bien sûr, lorsqu'on parle d'auteur(e)s ou d'écrivain(e)s, on ne parle par de ceux qui pensent l'être, mais de ceux qui le sont : celles et ceux qui travaillent leurs textes, qui maîtrisent leur langue, qui relisent leur œuvre jusqu'à la connaître par cœur, celles et ceux qui sont marqué(e)s par le talent.
Comment sait-on le genre qui nous va ? Personnellement, je ne l'ai jamais su. C'est l'écriture qui me l'a indiqué, lorsque j'ai fait mon premier roman. J'ai senti que la science-fiction était une terre fertile pour mon imagination. Mais j'ai testé également l'érotisme et le fantastique, et je me suis aperçue, toute modestie mise à part, ne pas être trop mauvaise dans ces genres. Un thème, surtout, revient, dans tous ces genres : la révolution sous toutes ses formes. Quoi que j'écrive, quelque soit le style, il y aura toujours une rébellion, une révolution, une insurrection. Bien sûr, ce thème va avec l'éternelle soif de liberté. Je pense donc que si un(e) écrivain(e) n'arrive pas à s'extraire de son genre, c'est qu'il est fait pour lui, et que même lorsqu'il arrive à sauter d'un genre à l'autre, un thème de prédilection le maintiendra.
Nous retrouvons ce thème principal chez Émile Zola dans la fustigation du pauvre, qu'il soit ouvrier dans Germinal ou paysan dans la Terre.
Philip K. Dick prend pour sa part, la défense des minorités opprimées, mais jugées dangereuses pour la société, les rebelles de Mars, les replicants.
Avec Sade, également, on retrouve un côté rebelle qui s'insurge ; la société à deux vitesses, avec les pauvres d'un côté qui subissent tout, et les riches de l'autre qui se permettent tout. Il met en avant systématiquement les masques de bienséance que portent les nantis. Comme dans Justine.
Chez les auteur(e)s indépendant(e)s ,il semble que ce phénomène s'applique également avec des auteur(e)s comme :
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Pascal Letteron dans la fantasy
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Michel Rouvère dans l'historique
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Patricia Epstein dans la science fiction et le fantastique
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Rose Morvan dans la romance
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Eric Abbel dans la dérision
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Patrice Quelard dans le sociétal
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Alexandre Barridon dans l'érotisme
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voir la librairie de Saisons d'écriture
Des genres s'appliquent-ils aux femmes, alors que d'autres semblent faits pour les hommes ? On peut se le demander ; car à l'heure où l'on parle le plus de liberté pour les femmes, elles en ont de moins en moins. La France qui se défend bien d'être un pays macho, en réalité est un de ceux où les femmes sont le plus mal. Mais passons, nous n'allons pas débattre sur le féminisme, toutefois, on remarque que la romance est plutôt réservée aux femmes, bien que des auteurs comme Guillaume Musso ravissent aujourd'hui la place de Danielle Steele. Toutefois le best seller 50 nuances de Grey est bien le travail d'une femme. Alors si les hommes se mettent au romantisme les femmes ont-elle puisé dans le registre masculin comme l'histoire ou le fantastique ? Car il est vrai que ces domaines sont plus réservés aux hommes, sauf lorsqu'il s'agit d'y mêler des sentiments amoureux. La femme serait-elle maintenue aujourd'hui dans un carcan romantique telle la princesse au haut de sa tour, pendant que son héros masculin guerroie à la tête des plus grandes armées moyenâgeuses ou de trolls et autres elfes ?
Où sont passés les audaces de Georges Sand et le militantisme d'André Léo ? Faut-il aujourd'hui encore que les femmes se cachent sous des pseudos masculins pour être éditées ou prises au sérieux ? Tant qu'elle se contentent d’écrire des imbécillités comme « la femme parfaite est une connasse », elles seront lues et même félicitées, mais qu'elle tentent d'écrire mieux, elles doivent le faire en auto- édition ou à compte d'auteur comme Virginia Woolf .
Lorsqu'on note sur google hommes auto-publiés, la première réponse donnée est : Une Charte pour les auteurs autopubliés : le sens de l'histoire, mais lorsqu'on note femmes auto-publiées sur le même moteur de recherche, on obtient : Ces femmes passionnées de voitures - Auto moto : magazine auto !
Allons mesdames, ne nous décourageons pas, un jour nous serons lues par des êtres intelligents, qui nous octroieront le droit d'être émancipatrices de science-fiction, d'obtenir des prix littéraires en histoire, de faire la une pour une œuvre de société reconnue. Il faut juste qu'un homme écrive ce livre.
Tel un animal de compagnie, un genre vous choisit-il ou choisissez-vous un genre ? En tous cas pour vous messieurs, toutes les portes sont ouvertes, pour les femmes, il faut s'accrocher et se battre encore pour que le genre que nous choisissons ne soit pas celui qu'on nous impose.
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